L'homme qui tua Lucky Luke - Matthieu Bonhomme
Qu'observe-t-on depuis que les éditions Dupuis ont imaginé une série parallèle aux aventures de Spirou et Fantasio en confiant à des auteurs le soin de réaliser une histoire décrochée de la série mère? Eh bien, que ces Spirou parallèles sont souvent bien plus réussis et enthousiasmants que ceux des continuateurs officiels de la série principale. Les éditions Dargaud ont été bien inspirées d'autoriser Matthieu Bonhomme, selon ce même principe, à fabriquer un one shot de Lucky Luke à sa manière, en marge de ceux qu'Achdé dessine depuis la mort de Morris, le créateur.
Est-ce parce qu'il n'avait qu'un album pour se faire plaisir, toujours est-il que Bonhomme a produit une pépite avec L'homme qui tua Lucky Luke. Seul au dessin et au scénario, il s'est affranchi du graphisme originel en dessinant un Lucky Luke à sa façon, plus réaliste que celui de Morris, mais sans le dénaturer ni bouleverser le style.
On n'est donc plus là dans le principe de l'imitation auquel s'astreignent les continuateurs de la série mère. Le pastiche de Bonhomme fait mouche. Les personnages sont travaillés et consistants, Luke apparaît plus sexy, les couleurs crépitent, les planches jouent sans cesse avec la lumière et les clartés, les plans sont cinématographiques.
Et Bonhomme commence l'album avec un uppercut au lecteur : le titre (référence à L'homme qui tua Liberty Valance, film de John Ford) se confirme dès la première planche avec un coup de feu dans le lointain dont un rapprochement splendide digne d'un travelling de film nous révèle qu'il fut fatal au héros qu'on croyait immortel.
Sidération.
Luke gît, une balle dans le dos, sous le regard stupéfait de la foule, tandis qu'un homme exulte, proclamant sa fierté d'avoir tué la légende. L'homme du titre, donc, selon toute vraisemblance. Sauf qu'on l'entend mais on ne le voit pas. On le sait tout proche, on l'entend tout proche, mais le plan suivant fait un retour en arrière de 3 jours. Pan.
L'excellente émission Funenbulles, spécialisée dans la vidéo brève de critique BD, propose une belle analyse de l'album de Matthieu Bonhomme, qui vous en dira encore un peu plus sur les ressorts de cet opus.
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